Sur ce blog, il sera régulièrement question des amis qui auront compté dans la vie de Jean Cocteau. Commençons avec Colette puisque les Jardins de Palais-Royal viennent de donner leurs noms à deux allées.

Jean Cocteau a rencontré Colette au Palais de Glace, quand elle y patinait avec son mari Willy et Polaire. En dépit de leur différence d’âge, ils ne se sont jamais perdus de vue. Leurs installations respectives au Palais Royal ont consolidé leurs liens. Durant les années 40 et 50, ils se rencontrent au Grand Véfour où ils ont leurs tables, à l’ombre des tilleuls, au bord du bassin. Ayant écrit tous les deux des oeuvres majeures, ils connaissent le prix de la solitude et d’un travail soutenu. « Je n’en profite pas pour l’envahir à toute heure, raconte Colette. Mais ses travaux variés rendent jalouse une gratteuse de papier et il y a de quoi ! » A son tour, il décrit son illustre voisine : « Je la distingue à peine. C’est une grosse mouche dorée qui se chauffe au soleil. » Ainsi, ils se guetteront, se rendront visite, évoqueront leurs chats, participeront ensemble à des enregistrements radiophoniques. « Nous n’avons jamais eu besoin de beaucoup de paroles, avoue-t-elle dans une lettre. Rien ne t’échappe de ce qui m’attache à toi, mon jeune frère qui en tout es mon aîné, magiquement. » A la mort de son amie, Cocteau constate : « Bien sûr que mon Palais-Royal sans elle, ce n’est plus mon Palais-Royal ! Il ajoute : « Elle a quitté son corps comme une chatte. Et c’est comme une chatte qu’elle me rendra visite. Sans ouvrir les portes ». Etrange coïncidence : à l’Académie Royale de Belgique, il occupera le fauteuil de cette femme glorieuse, vulnérable, toujours attachante qui l’avait félicité de ne connaître « ni domaines interdits ni routes brouillées ni seuils effacés ».

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